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GEORGE VIAU ET LE CONSORTIUM DANOIS

George Viau et le Consortium Danois

Le 14 février 1918, George Viau vend 207 œuvres de sa collection à un consortium danois pour la somme de 1.371.760 couronnes danoises.

Pourquoi Viau vend-il autant en une seule fois ? Et à des particuliers ? La seule explication tient à la mort de Degas, survenue le 27 septembre 1917 et dont l’importante collection doit être dispersée rapidement.

Or, George Viau a toujours vénéré cet artiste qu’il a rencontré dans les années 1880 chez Henri Rouart ami et condisciple du peintre au lycée Louis le Grand. Une admiration sans limite, malgré le fossé idéologique qui les séparait sur l’affaire Dreyfus. Degas étant, contrairement à Viau, farouchement antisémite.

Or, pour acheter en nombre les œuvres posthumes de Degas, il fallait que le collectionneur se sépare rapidement d’un grand nombre de ses  tableaux. L’arrivée du Consortium allait être une aubaine.

Pour bien comprendre, il faut remonter un peu le temps.

 

Création du Consortium

Au Danemark, un homme d’affaire et collectionneur d’art Wilhelm Hansen cherche à faire connaître les impressionnistes français au plus grand nombre de ses compatriotes. Il sait que les musées de son pays ne sont pas très réactifs aux mouvements artistiques.

 

Wilhelm HANSEN

Un peu plus tard, il décide avec le chirurgien-dentiste parisien et Paul Jamot, un autre critique d’art et peintre, de fonder une Association pour l’Art français au Danemark (Foreningen Fransk Kunst). Les trois hommes organisent des conférences et des expositions qui rencontrent un grand succès.

Venant souvent à Paris pour ses affaires (il a fondé au Danemark une compagnie d’assurance populaire HAFNIA dont il a créé une succursale à Paris en 1910), il se lie d’amitié avec Théodore Duret, critique d’art réputé et ami intime de la plupart des peintres de l’époque. Duret, qu’Hansen a connu grâce à son ami Karl Madsen, critique d’art danois, va avant la guerre, l’aider à acheter des toiles de maîtres et lui ouvrir les portes des collectionneurs les plus en vue de Paris. C’est ainsi qu’il fait la connaissance de George Viau.

 

Théodore Duret dans son bureau, peint par Vuillard.

 

 

Hansen décide alors de passer à l’offensive. Avec un autre collectionneur danois, Herman Heilbuth et les marchands d’art Viggo Winkel et Peter Magnussen, ils fondent un Consortium grâce auquel ils engagent des fonds en commun. Avec cet argent ils peuvent acheter à des « prix de guerre » c’est-à-dire très bas, des collections complètes, se partager les toiles et revendre les autres.

Pour Hansen et Heilbuth, se partager les toiles ne signifie pas les enfermer chez eux à l’abri des regards. Bien au contraire puisque Hansen sera le premier à ouvrir les portes de  sa maison d’Ordrupgaard au public.

Nous savons que pendant la guerre, le transport des tableaux de la France au Danemark n’a pas été facile. Le consortium a été obligé de faire transiter un certain nombre d’œuvres  par la Suisse (collections Montaignac et Sarlin), avec organisation d’une exposition à Genève en 1918. Mais rien pour la collection VIAU.

Nous pensons qu’étant donné les rapports privilégiés entre Hansen et Viau, l’achat des tableaux du collectionneur français ont été acheminés par Monsieur Duval-Fleury, grand ami de Wilhelm Hansen et surtout patron en France  de la succursale de la compagnie d’assurance créée par ce même Wilhelm Hansen. C’est ce dernier qui, sur l’insistance de George Viau, avait chargé personnellement Duval-Fleury de s’occuper du transport par voie maritime.

 

Emile DUVAL-FLEURY
Emile DUVAL-FLEURY

 

Travail de recherche

Notre but principal était de retrouver la trace des fameuses œuvres vendues par Viau au Consortium. Hélas, à ce jour, nous n’avons toujours pas retrouvé de document officiel prouvant l’existence de la transaction entre les deux parties. Ni au Danemark, ni en France.

Nous avions recensé, avant d’entamer notre quête, la présence de 143 tableaux. Il en manquait donc plus de 60 !

Ce fut alors un travail fastidieux et méticuleux de recherche dans les expositions, les ventes, les archives.

Nous avons pu retrouver un grand nombre d’œuvres vendues par Viau au Consortium dans l’exposition de Charlottenborg à Copenhague organisée par Winkel et Magnussen en octobre 1918 c’est-à-dire plusieurs mois après la vente Viau au Consortium.

 

George Viau - Exposition Charlottenborg 1918
George Viau – Exposition Charlottenborg 1918

Travail rendu encore plus ardu avec la banqueroute connue par Hansen et Heilbuth vers 1922 qui les a obligé à vendre une grande partie de leur collection fraîchement acquise. Tableaux vendus en Suisse, au Japon, en France ou aux États-Unis.

Si les musées danois comme Ordrupgaard n’ont pas été d’un soutien précieux, nous avons pu heureusement compter sur la gentillesse et le professionnalisme de plusieurs chercheurs danois comme Ditte Herborg Krogh de la galerie d’art Bruun Rasmussen, d’Iben Bruun-Aamodt, Bibliothécaire à la Bibliothèque Royale du Danemark ou de Jesper Svenningsen un historien danois qui a fait un travail remarquable sur le Consortium Danois.

Au bout de plusieurs mois, nous avons fini par retrouver 197 œuvres sur les 207 prévues dans l’achat. Malheureusement, beaucoup d’illustrations manquent à l’appel puisque nous n’avons que 96 photos ! Quelques exemples majeurs des peintures achetées par le Consortium que l’on peut retrouver, pour la plupart, dans l’onglet Collection de George Viau dans les Musées /Ordrupgaard.

 

 

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